Solitude Solo de Daniel Léveillé (Critique)
Par Marie-Ève Muller
Sauts groupés, grands jetés, mouvements brusques, développés fluides. Entre des gestes empruntés au ballet et des poses de sumo, Solitudes Solo déconcerte et transporte. Les huit chorégraphies formant le spectacle et signées par Daniel Léveillé mettent en valeur la force physique des cinq interprètes et la beauté particulière du geste de chacun.
Solitudes Solo présente huit variations de la même chorégraphie, avec des gestes répétitifs, chaque fois interprétés et organisés différemment. Si Justin Gionnet évoque l’androgyne dans sa corporalité, Emmanuel Proulx joue des hanches dans un mouvement-signature. Mathieu Campeau a le geste dur, Simon Renaud, plus rond. Esther Gaudette, seule femme des cinq danseurs, allie force et délicatesse. Son regard puissant happe le spectateur et ajoute à la profondeur de sa danse, un des moments phares de l’œuvre.
Le corps est ici bien mis en valeur par Daniel Léveillé. La plupart des huit chorégraphies sont interprétées par des danseurs portant seulement la petite culotte. Des postures tenues longtemps exigent le savant mélange entre souplesse et force, pour mettre en valeur la ligne de tel muscle qui se découpe, laissant une impression de routine de yoga à certains moments.
Créé en 2012 et ayant remporté le Prix du Conseil des arts et des lettres du Québec pour la meilleure chorégraphie la même année, Solitudes Solo est une œuvre de pureté et de sobriété, où la danse dans son état le plus brut est mise en valeur. Le silence y a sa large part, laissant la respiration devenir musique, au point où les violons de Bach deviennent accessoires. On se serait vraiment passé de Somewhere over the rainbow d’Israel Kamakawiwoʻole’s comme dernière musique d’accompagnement. Daniel Léveillé avait bien réussi à nous faire comprendre sans cette finale un brin trop convenue que la «solitude n’a pas besoin d’être un sentiment de tristesse», comme le chante Lisa Leblanc.